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Photo du rédacteur Cécilia Commo

La Baisse De Libido Est-Elle Une Cause De Rupture ?

En complément de cet article, vous pouvez écouter le replay de l'émission de Flavie Flament sur le sujet avec Cécilia Commo en invitée - REPLAY RTL



Qu’on le déplore ou pas, nous sommes engagés dans une époque où le culte de Soi et l’exigence d’un certain bien-être éclabousse toutes les dimensions de notre vie : bien-être dans sa vie professionnelle, bien-être dans sa parentalité, bien-être dans son épanouissement personnel, bien-être dans son corps. Partout nous sommes incités à livrer une meilleure version de nous-même, une version où parait-il nous goûterons aux délices de ce nouveau Soi, tourné vers nous-même et apte à libérer tout notre potentiel.

Le territoire sexuel n’échappe pas à la règle avec une exigence supplémentaire : passer du bien-être au mieux-être. Ne plus se suffire d’une bonne sexualité mais se tourner vers une meilleure sexualité, une sexualité exaltante. Passer du plaisir au désir. Et de préférence un désir puissant et manifeste, un désir que l’autre peut identifier de façon claire. Certains même exigent le désir des premiers jours, incapables d’accepter sa transformation. Or si le plaisir sexuel peut se déployer seul, le désir, lui, a besoin du plaisir pour exister. On ne désire pas ce que l’on estime déplaisant. Hélas le désir échappe bien souvent à notre compréhension et à notre conscience. A quoi ressemble t’il ? Doit-il se nourrir de l’autre ou de ses propres fantasmes ? Faut-il qu’il soit altruiste ou égoïste ? Doit-il être ambitieux ou modeste ? Doit-il être toujours présent ou peut-il se cacher ? Est-il spontané ou s’apprivoise-t-il ? Enfin, est-il le garant de la longévité d’un couple ?

S’il demeure mystérieux, il apparait que le désir sexuel n’a pas besoin d’exister à tout prix pour maintenir la bonne vitalité d’un couple. Le couple se nourrit de l'appréciation que l'on a l'un pour l'autre. Cette appréciation peut se manifester dans sa dimension sexuelle (le désir) mais pas uniquement. Elle peut investir d'autres dimensions : la tendresse, la sensualité, l'affectivité, la complicité.


Mais qu’en est-il de la sexualité ?

 

Peut-on faire couple sans dimension sexuelle ? La sexualité peut-elle prendre des formes inédites où la pulsion sexuelle est ignorée ? La sexualité n’est-elle pas par nature oscillante ? N’est ce pas la souffrance que peut causer l’absence de sexualité plus que l’absence de sexualité elle-même qui mène un couple vers la rupture ?

Si aucune « plainte » n’émane du couple, il n’y pas lieu de se conformer à un schéma sexuel standardisé : la bonne sexualité c’est celle qui nous convient à tous les deux, peu importe la fréquence et la diversité (ou l’absence de diversité).

Au même titre qu’une bonne sexualité ne sauve pas un couple de la rupture, une sexualité faible ou absente ne la déclenche pas non plus forcément. Elle peut être compensée par une affectivité  ou une complicité très puissante qui convient aux deux partenaires (l'appréciation se développe alors dans sa dimension affective). La sexualité est peut-être nécessaire pour faire couple mais sûrement pas suffisante.

En revanche, quand l’absence de sexualité est ressentie par soi ou par son partenaire comme douloureuse et génératrice de mal-être, il va de soit que la résolution de cette souffrance peut prendre divers chemins, dont celui de la séparation (mais aussi celui de la relation extra-couple, celui de la consultation chez un sexologue, celui de comportements auto-destructeurs, etc…). 

La colère est certes suscitée par cette abstinence sexuelle auquel l’autre nous contraint mais ce n’est pas tant l’absence de sexualité qui déclenche la plainte douloureuse que l’absence de désir sexuel de l’autre pour soi. Généralement, l’estime de soi est enchâssée dans notre capacité à être apprécié et désiré (et cela ne concerne pas que le désir sexuel). Dans le couple, désir et sexualité sont donc souvent fortement associés, voire confondus. Car bien souvent la plainte liée à l’absence de sexualité est une plainte liée à l’absence de désir : l’autre souffre de ne pas être désiré, il n’est pas désirable.

Si vous considérez que la sexualité de votre couple est "en berne"* et que cela n'est pas un choix commun, il est fort probable que le désir et/ou plaisir sont aux abonnés absents. Ceci peut être la conséquence de causes conscientes ou inconscientes, physiques ou psychiques, parmi lesquelles on peut évoquer :


L’absence d’imagination érotique (nécessaire à la création d’un territoire érotique psychique personnel alimenté par la jouissance à venir).

L’arrêt de la séduction entre les partenaires (identifié comme une absence de désirabilité).

L’absence de codage érotique / aucun stimuli érotique (ce qui participe à desérotiser son partenaire ou la situation - rien ne semble excitant). 

Une difficulté à relancer une sexualité qui s’est mise en pose (la gêne l’emporte sur le reste, le jugement de l’autre fait obstacle, incapacité à lancer ou relancer son imagination érotique).

Des conflits ouverts, non résolus ou larvés dans le couple (la colère se transforme en refus passif ou actif de s’offrir à l’autre ou de désirer l’autre, elle occupe tout l'espace psychique).

Un déséquilibre dans la relation (quand un partenaire est vécu comme trop étouffant ou trop évitant ou trop dominant ou trop passif ou trop agressif).

Une sexualité comme anesthésique à l'anxiété (une demande sexuelle - souvent intense - qui sert à se rassurer sur sa valeur auprès de l'autre et à tendance à étouffer le désir de l'autre).

Une incompréhension sur ce qui érotise le partenaire (le plaisir n’arrive pas à exister ; l’indifférence s’installe ou pire, le déplaisir puis l'évitement ou le rejet).

Une éducation érotique très sommaire qui ne s’articule qu’autour du coït ou des zones génitales (une absence de liberté et de découverte sexuelles souvent le fruit d'une vision infantile ou négative de la sexualité).

Une fixité dans le déroulement et la perception de la sexualité (une sexualité copiée/collée qui ne se renouvelle jamais, un espace érotique jamais investi).

Quand le désir de l’autre est trop pressant voire étouffant (il empêche notre propre désir de se déployer).

Une sexualité fixée sur une excitation ressentie très puissante (une sexualité qui n’existe que par l’intensité de poussées hormonales fortes - comme celles qui se déclenchent lors des débuts d’une relation ou dans les relations éphémères).

Un sentiment d’exclusion et d’absence de partage dans la sexualité (se retrouve quand un des deux partenaire est dans d’une forme de performance excluante des attentes réelles de l’autre).

L’absence de séduction (le désir existe par le regard que l’on pose sur l’autre. Si ce regard s’indiffère  ou s’agace le désir s’efface).

Des douleurs physiques (la douleur éteint le plaisir et déclenche du déplaisir, ce qui ensuite se traduira inévitablement par un évitement de la douleur et donc de la sexualité).

Des pathologies organiques ou des chirurgies (certaines pathologies comme l’endométriose ou chirugies comme une prostatectomie totale perturbent fortement la sexualité).

Une phase dépressive (on perd l’Envie de tout et donc de la sexualité).

Des effets secondaires de médicaments / traitements (certains médicaments ainsi que certaines pilules contraceptives étouffent la libido et laissent un vide en terme d’envie sexuelle).

Des troubles érectiles (ils peuvent déclencher un évitement de la sexualité afin de ne pas se retrouver en situation d’échec).

Des troubles éjaculatoires (le stress et la peur d’être vu comme un mauvais amant peut amener à éviter la relation sexuelle - le trouble éjaculatoire précoce peut conduire à des tensions dans le couple).

Une mauvaise connaissance de son corps et de ses comportements dans l'adéquation au plaisir et à la jouissance.

Les PMA (le sexe génital peut être perçu comme un organe reproducteur qui ne fonctionne pas, la sexualité n’est plus vue comme une activité réjouissante, l’intrusion de la médicalisation dans la sphère sexo/géntitale transforme la sphère intime).

Une hyposexualité (la pulsion sexuelle est très faiblement perçue voire elle n’a jamais existé).

L’envahissement psychique ou la non disponibilité (des difficultés professionnelles, financières, médicales et/ou psychologiques pour soi ou des proches peuvent occuper tout l'espace mental laissant peu ou plus de place à l’énergie sexuelle).

La fatigue ! (quand on est fatigué(e) ou épuisé(e) on aspire à un territoire physique et mental où on on se repose et où personne ne nous sollicite. La sexualité, qui peut être très énergivore, est alors vécue comme une contrainte qui s’ajoute à d’autres, et ce d'autant plus si la sexualité passe après toutes les contingences d'une vie professionnelle et familiale bien remplie !).


Une sexualité en berne n’est problématique que si et seulement si elle engendre une souffrance, une dévalorisation ou une dégradation de l’estime pour soi ou pour l’autre. Définir ce qui pour soi correspond à une sexualité en berne, revient à définir ce qui ne me convient pas à moi, de façon très prosaïque et non de façon conceptuelle et de le confronter au ressenti de l’autre. 

C’est en définissant ou redéfinissant mon territoire érotique tout en prenant en compte celui de ma/mon conjoint(e), en harmonisant nos attentes et nos envies que nous pourrons regarder autrement notre vie sexuelle et l’ajuster à ce qu’on a envie de vivre sexuellement… ensemble.


 


* Reste à définir ce que vous considérez en terme de sexualité : avec ou sans pénétration ? Génitale ou érotique ? et « en berne » : en qualité ou en quantité ?








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